Stratégies

Valérie Le Roy : «  Nous avons contenu les hausses des prestations techniques en ne dépassant pas 4 % »

Par Pascale Baziller | Le | Agences & organisations

Valérie Le Roy, directrice du Salon International de l’Agriculture (Comexposium) présente le Salon International de l’Agriculture 2023. Une nouvelle édition qui grandit et innove en lien avec les tendances et l’actualité de la société.

Valérie Le Roy, directrice du Salon International de l’Agriculture (Comexposium) - © Valérie Le Roy - Studio Cui Cui -SIA 2023
Valérie Le Roy, directrice du Salon International de l’Agriculture (Comexposium) - © Valérie Le Roy - Studio Cui Cui -SIA 2023

Comment s’est construit le SIA 2023 ?

Cette nouvelle édition se démarque par la venue de nombreux acteurs. Cela nous a conduits à reconfigurer l’implantation. Par exemple, les régions métropoles de France sont ainsi réparties sur deux halls différents au lieu d’un seul hall, nous avons fait le choix d’investir un nouveau hall pour apporter un confort de visite. Par ailleurs, nous avons eu un retour en force des DROM (départements et régions d’outre-mer), ils sont tous présents à l’exception d’un seul. De fait, nous les avons déplacés du pavillon 5.1 au pavillon 5.2 afin d’avoir une plus grande surface d’exposition. Nous avons installé l’international dans le 5.1 Là encore, il y a un renouveau avec la présence de 16 pavillons internationaux qui représentent plus de 20 pays, contre 12 pavillons avant les événements de la crise sanitaire. Au global, le SIA occupe 10 halls dont 9 ouverts au grand public et un réservé au Concours général agricole des produits et des vins. Ce sont plus de 14000 échantillons de vin et à peu près 6000 échantillons de produits qui sont exposés et 7000 jurés (moitié de professionnels et moitié d’amateurs) qui viennent déguster et décerner des médailles. Nous avons donc augmenté la surface d’exposition de 4500 m2 par rapport à l’édition 2022. Nous enregistrons 1080 exposants. C’est un retour à la tendance d’avant Covid qui se confirme grâce à un taux de fidélisation de 75 % des exposants.

SIA 2023, une surface d’exposition qui a augmenté de 4500 m2 - © Romain Devoise
SIA 2023, une surface d’exposition qui a augmenté de 4500 m2 - © Romain Devoise

Quel est l’impact de la crise énergétique sur l’organisation ?

Nous avons des exposants fidèles qui ont le même budget qu’en 2022, mais ils ont été contraints de diminuer leur surface d’exposition en raison des augmentations tarifaires des prestations techniques. Mais, nous avons compensé cette perte par la venue de nouveaux exposants. La hausse du coût des prestations techniques a une incidence aussi bien sur les exposants que pour nous. Elle se situe à 4 % dans la fourchette basse et 11 % dans la haute. La question qui s’est posée est comment limiter cet impact ? D’autant que la particularité du salon de l’agriculture est d’être un gros consommateur de fluides. Les halls qui accueillent les animaux sont ouverts 24h sur 24h, ils consomment beaucoup d’électricité et d’eau (lavage des bêtes…). Face à cette situation, nous avons décidé de contenir les hausses du coût des prestations facturées aux exposants en ne dépassant pas 4 %. Nous vendons directement aux exposants la surface d’exposition, un certain nombre d’équipements, les cartes d’invitation et la communication. Les prestations techniques pures dépendent du bailleur (notamment Viparis). Dans ce contexte, nous développons également une politique d’économie d’énergie et de ressources. Nous avons mis au point avec Viparis un programme de gestion des lumières (réduction pendant la nuit) et de l’eau avec les éleveurs sur les zones de douche pour les animaux pour réaliser des économies. Le SIA est spécifique, tous les événements ne sont pas confrontés à la même problématique dont celle d’avoir des halls ouverts jour et nuit.

Cela demande une grande agilité ?

Ces dernières années ont montré la souplesse et l’agilité des professionnels de l’événementiel, que ce soient les agences ou les organisateurs d’événements. L’année dernière par exemple, nous avons obtenu l’autorisation administrative officielle d’ouvrir le salon le 14 janvier 2022 pour une ouverture le 24 février 2022. Nous avons également dû nous adapter aux obligations sanitaires imposées avec l’obligation du port du masque, l’interdiction de déguster et de s’asseoir à des tables au restaurant. Alors, même si cette année nous sommes confrontés aux conséquences de la crise énergétique, nous n’avons pas eu cette incertitude énorme et stressante de se demander dans quelles conditions on allait pouvoir ouvrir. 

SIA 2023, un carrefour des dernières tendances de l’agriculture ouvert à tous les publics - © Romain Devoise
SIA 2023, un carrefour des dernières tendances de l’agriculture ouvert à tous les publics - © Romain Devoise

 

Vous êtes confiante sur cette édition 2023 ?

Nous sommes satisfaits du nombre des exposants (1080) et des premiers indicateurs en termes de visitorat même si rien n’est fait sur un salon grand public qui dure 9 jours. Il suffit qu’il y ait une grève, de la neige… pour que le visitorat soit impacté. Or, la billetterie représente 1/3 de nos recettes (2/3 les exposants). Aujourd’hui, nous sommes dans la lignée des tendances de consommation de la société, avec des visiteurs qui achètent leur billet sur internet à la dernière minute. Donc, il est difficile de faire des évaluations précises. En revanche, les premiers signes sont encourageants avec notamment un retour des autocaristes régionaux qui sont pourvoyeurs de visiteurs. Ils avaient un peu disparu ces dernières années et reviennent cette année, c’est une bonne nouvelle. Nous ne cherchons pas à faire un record de fréquentation mais à renouer avec notre niveau d’accueil de 1 % de la population française, c’est-à-dire environ 600 000/620 000 visiteurs (chiffre moyen). Si nous atteignons ce nombre nous serons très contents. De plus, par rapport à l’année dernière, nous avons l’impression d’avoir retrouvé notre métier d’organisateur dont une des spécificités est de limiter les aléas même s’il y en a toujours. Nos points d’interrogation sont davantage sur le secteur, l’actualité et tout ce qui est connexe mais qui peut rencontrer à un moment le salon de l’agriculture. Par exemple les revendications sur les retraites, sur les néonicotinoïdes, sur la gestion de ressources pour l’environnement… qui peuvent avoir un impact sur notre organisation et sur le salon. Cela a demandé la mise en place de dispositifs spécifiques. Car, ce qui nous importe est l’identification du risque avant que cela puisse « dégénérer » sur site. Nous recevons des personnes politiques mais nous sommes avant tout un événement familial et populaire. Notre but est que les familles aient plaisir à se promener et vivre des expériences dans le salon.   

Comment appréhendez-vous le BtoB ?

Le BtoB est une composante de plus en plus importante du salon. Il prend une nouvelle dimension cette année avec un espace dédié qui passe de 280 m² à 640 m². Cet espace comprend un club affaires, des espaces lounge, un salon avec une terrasse attenante donnant sur le ring de présentation des animaux et une salle de réunion équipée dans laquelle nous coorganisons des rencontres, des Think Tanks, des prises de parole. Nous y proposons différents services comme des parcours experts (parcours végétal, parcours animal, parcours inter filières…) et des visites guidées. Cette zone s’apparente à un salon BtoB au sein d’un salon grand public. De nombreuses rencontres pro et business s’y tiennent. Près de 100 000 de nos visiteurs viennent au SIA pour une motivation professionnelle. Nous accueillons ainsi sur cet espace de nombreux professionnels et une cinquantaine de délégations étrangères d’acheteurs en partenariat avec les services internationaux du ministère de l’Agriculture. Sur les 9 jours, ce sont près de 1000 rendez-vous d’affaires, ceux organisés sur les stands des grands exposants (activité business) Lidl au SIAet ceux qui se déroulent dans l’espace BtoB.  

Quelles sont les nouveautés que vous avez initiées pour cette édition 2023 ?

Nous abordons pour la première fois le thème de l’agriculture non nourricière (Hall 2.2). Dans notre feuille de route, je considère que le salon de l’agriculture doit être ancré dans la réalité de notre société. La question des résidus des matières agricoles est un sujet d’actualité. Or, nous avons une filière des résidus en France qui se développe et qui n’est pas connue. Par exemple, le chanvre est utilisé pour former des parpaings ou les coquilles d’huîtres sont transformées en résine pour faire des montures de lunettes… Nous avons créé un espace pédagogique de ces produits biosourcés. Cette ouverture sur cette filière et un secteur que nous n’avions pas traité jusqu’à maintenant s’est faite en collaboration avec l’ADEME et l’Association chimie du végétal (ACDV). Je pense que cette initiative peut être un indicateur pour les organisateurs d’événements sur l’opportunité de créer un secteur à terme.

Autre nouveauté sur le salon est le lancement de la campagne « J’adopte la SIA’ttitude ». Le SIA est un événement pour tous et responsable qui accueille toutes les générations. Nous avons souhaité appeler la communauté, c’est-à-dire tous les publics qui font et participent à la réussite du SIA (exposants, visiteurs, prestataires, partenaires, organisateurs…), à contribuer à un vivre ensemble positif en adoptant les bons gestes lors de leur présence sur le salon (tri des déchets, respect de ses voisins et des animaux…).